Les circonstances dans lesquelles un PSE a été élaboré peuvent révéler un manquement de l’employeur qui justifie la démission d’un salarié. Quel effet donner à cette démission ? C’est le thème abordé dans un arrêt du 17 janvier 2024 (Cass. soc., 17-1-24, n°22-22561 et 22-22564).
Une société engage des négociations avec les représentants du personnel (IRP) en vue de la conclusion d’un PSE. A l’issue des premières négociations, ce sera finalement un document unilatéral de l’employeur comportant un PSE, qui sera soumis pour homologation à la DREETS. Celle-ci refuse d’homologuer le document, s’ouvre alors un second cycle de négociations. Celui-ci se révèle fructueux puisqu’un accord est trouvé, il est, par la suite, validé par l’administration.
Au cours du second cycle de négociations, des salariés démissionnent au motif qu’ils ont été exclus des mesures d’accompagnement du PSE, et également en raison du refus de l’employeur d’accéder à leur demande de suspension du contrat afin qu’ils puissent rechercher un nouvel emploi.
Les démissions seront qualifiées par les juges du fond en prise d’acte produisant les effets d’un licenciement sans cause réelle et sérieuse. L’employeur forme alors un pourvoi en cassation.
La question posée à la Cour de cassation était en deux temps : premièrement, la démission d’un salarié motivée par le contexte de réorganisation de l’entreprise, et par un refus catégorique de suspendre le contrat en vue de la recherche d’un emploi, constitue-t-elle une prise d’acte ?
Ensuite, si une telle qualification est retenue, celle-ci doit-elle, en pareilles circonstances, s’analyser en une démission, ou bien en un licenciement sans cause réelle et sérieuse ?
La Cour de cassation estime dans cette affaire, que la démission des salariés était équivoque, elle était donc constitutive d’une prise d’acte et elle fait produire à celle-ci les effets d’un licenciement sans cause réelle et sérieuse.
Pour arriver à cette conclusion, la Cour s’aligne sur la position des juges du fond.
Les juges du fond avaient relevé dans les lettres de démission
- les salariés évoquaient le contexte de réorganisation
- que la catégorie professionnelle à laquelle ils appartenaient, était visée par la suppression de postes.
En outre, l’employeur avait systématiquement refusé la demande des salariés de voir leur contrat de travail suspendu, demande motivée par la recherche d’emploi.
Dans de telles circonstances, la démission était équivoque, et non complètement voulue. La prise d’acte était ainsi caractérisée.
Pour ensuite faire produire à cette prise d’acte, les effets d’un licenciement sans cause réelle et sérieuse, les magistrats relèvent que l’administration ainsi que les IRP avaient émis plusieurs alertes à l’encontre de l’employeur, au cours de la procédure d’élaboration du PSE. Ces alertes sont restées sans effet et ont conduit à un refus d’homologation du PSE unilatéral. Un premier manquement de l’employeur était donc caractérisé.
Ensuite, un autre manquement de l’employeur a consisté, à refuser systématiquement les demandes de suspension du contrat de travail, lesquelles étaient motivées, comme dit précédemment, par la recherche d’un nouvel emploi.
Le refus de l’employeur, couplé à l’incertitude des salariés quant à l’issue des négociations en cours ne laissaient aux salariés que deux possibilités : ou refuser une embauche chez un nouvel employeur, ou démissionner simplement.
Ces faits ont été reconnus comme un manquement de l’employeur empêchant la poursuite du contrat de travail.
La prise d’acte des salariés devait donc, en pareilles circonstances, produire les effets d’un licenciement sans cause réelle et sérieuse.
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